| Sujet: Writing with a bloody ink. Lun 16 Avr - 20:00 | |
| Tada! Oui, en dehors des Rp, j'écris. Je passe ma vie à écrire on dirait, n'est-ce pas ? C'est pas un mal quand même. Alors voilà, je vais vous faire partager ce qui occupe mon temps! Et puis surtout, lâcher vous sur les commentaires (surtout ceux qui sont gentils hein :x ), je veux vos avis! - I- L'Eclat:
Des flocons opalescents voletaient dans les airs, toujours en suspension, dans une course lente, comme si la gravité ne les atteignait pas, à eux. Je ne sais même plus pourquoi j'étais sortis, mais en tous cas, je déambulais bel et bien dans ce labyrinthe de rues enneigées.
Je le connaissais par cœur, ce dédale de ruelles, j'aurais pu le traverser les yeux fermés. J'en connaissais chaque porte, chaque croisement, la position des ombres à n'importe quel moment de la journée. J'avais passé ma vie entière à l'intérieur. Les pavés avaient connu la lourdeur de mes larmes, les murs, entendus mes premiers éclats de rire, c'était devenu mon monde, j'étais persuadée d'en être la gardienne, l’Élue, d'en être la détentrice même. Et la neige ne m'empêchait pas de reconnaître chacun des angles des petites maisons mitoyennes. Sauf peut-être en ce matin de février. Si je me rappelle bien, c'était un mardi.
Je m'étais levée très tôt, poussant d'un geste habile mes couvertures. Le miroir brisé accroché en face de mon lit, je n'y avais pourtant pas prêté attention. Sur la pointe des pieds, j'avais tiré le battant de la grande armoire victorienne et avais revêtu les premiers habits qui m'étaient tombés sous la main. Et toujours sans me faire entendre, j'avais ouvert ma fenêtre. D'un saut aussi léger que les flocons qui inondaient l'horizon, j'avais touché le sol. Et j'étais partie. Il ne fallait pas que je tarde trop,que quelqu'un s’aperçoive que mes draps étaient désormais vides. Je n'ai jamais été une petite fille mutine, ni en quête constante de liberté. Je me complaisais dans mon insouciance, avoir toujours quelqu'un à mon chevet était pour moi le plus grand des luxes. Les tracas étaient faits pour les adultes. Moi, je voulais juste pouvoir jouer dans la neige, sans rien demander à personne.
Je m'étais arrêtée au croisement d'une ruelle à peine plus sombre que les autres. Il me semblait pourtant ne jamais l'avoir vue... Et ma curiosité enfantine m'avait poussée à m'y enfoncer, juste un peu, juste pour voir... La neige fondait petit à petit sous mes pas, à mesure que le soleil poursuivait son ascension imperturbable. La ruelle ne semblait jamais finir, il y avait toujours un tournant qui me poussait à m'avancer un peu plus. C'était comme si j'étais tirée par un fil, je ne pouvais pas faire machine arrière, alors même que je voyais les heures défiler. Combien de temps ais-je marché ce jour-là ? Trente minutes ? Une heure ? Deux …? Je ne sais même pas moi-même. La seule chose que je sais, c'est que je ne suis jamais rentrée. Il me plait de me dire que mes parents et ma sœur ont remué ciel et terre pour retrouver ma trace. Mais moi aussi, je ne sais pas où je suis allée. D'ailleurs, je ne sais même pas où je suis à présent. La dernière chose dont je me souviens, c'est une éclat de métal dans l'obscurité de la dernière impasse.
Ici, il fait continuellement noir. Je n'ai pas voulu compter les jours.
- II- Le chemin du Néant:
Aujourd'hui, je suis morte.
On m'avait bien leurré, le paradis n'existe pas. Ici, je flotte continuellement, dans le vide, dans le noir le plus profond que je n'ai pu jamais découvrir. Personne autour de moi, je suis seule. Je ne vais ni mal, ni bien. Suis-je assise, allongée, debout ? Je ne sais pas. Je ne vois plus que cette obscurité qui m'obsède. Je n'entend pas non plus, ce silence est omniprésent. Ma plus grande peur est d'en perdre la tête. A moins que ça n'en soit le but. Devenir fou pour supporter l'absence, supporter la solitude. Devenir fou pour entendre une simple mélodie, se sentir... vivant. Qui sait, personne n'est là pour me l'expliquer. Alors j'erre, j'erre dans les limbes de ma propre conscience, six pieds sous Terre en ayant perdu la notion de pesanteur. Vit-on pour ça ? Se démener pour survivre, et finir dans le néant ? Sombrer dans la folie ? J'ai évité ces troubles alors que mon cœur battait encore, on me les impose quand le mécanisme s'arrête. Cruelle destinée.
Pour occuper les insoutenables secondes qui frappent mon esprit sans se taire jamais, je repense à mon être durant sa courte existence. Courte, oui, devant l'éternité que je me prépare à vivre sans demeurer vraiment vivante. Penser me permettrait peut-être d'échapper à mon triste sort. Il me suffit de fermer les yeux, et assister au long-métrage projeté spécialement pour moi. Ma vie s'apparentait peut-être à ça, au fond.
Une petite fille, blonde, courrait. Elle courrait,oui, le long d'un chemin. Je la voyais évoluer, grandir, à chaque pas qu'elle faisait. Presque imperceptiblement au début. La petite fille dévia du chemin, se ruant vers un groupe d'enfants. Malgré ses efforts pour se faire remarquer, elle semblait invisible. Un seul l'entendit, mais il mit une main devant sa bouche, pour éviter qu'on ne puisse la voir. Les larmes jaillirent facilement de ses grands yeux d'enfant, et elle s'en retourna sur le chemin, abattue. Elle ne courrait plus. Sa démarche devenait lourde, jusqu'à ce qu'elle croise quelqu'un. Une fille ? Un garçon ? Peut importe, elle lui tendit la main, il était seul, assis sur l'asphalte. Le sourire de la petite fille réapparut quand elle réussit à le relever, jusqu'à ce qu'il parte en courant, loin du chemin. Elle ne comprit pas, pensait qu'il allait revenir. Il ne revint pas, alors elle continua sa route. Le temps passa, et un petit garçon à la tête brune vint s'accrocher à sa main. Il lui ressemblait, beaucoup. Leurs doigts étaient reliés par un lien, à l'odeur de fer, à la couleur écarlate. Elle le protégeait, le retenait quand il s'apprêtait à tomber. Ils n'arrêtaient pas de marcher, main dans la main. Si la colère aurait bien pu les séparer, leurs doigts, scellés, ne pouvaient se décoller. Et à un moment, leur marche fut interrompue. La petite fille se mit à pleurer, tirer tant qu'elle le pouvait pour que le petit garçon ne soit pas happé par le vide qui se formait à ses côtés. Elle le retenait, de toutes ses forces, de tout son être, les larmes roulant sur ses joues, elle était plus puissante que jamais. Finalement, le vide se referma, et la marche put reprendre. Inlassablement. Le petit garçon semblait avoir tout oublié, mais la petite fille, qui avait bien grandi, portait encore sur ses pommettes un éclat de cristal. Un souvenir...
Je rouvre les yeux quelques secondes, observant toujours cette vide obscurité. Mon cœur, qui ne bat pourtant plus, me donne l'impression de redevenir vivante. Ce n'est qu'une illusion, mes yeux ne sont même plus capables de pleurer. Ils essayent, en vain. Je les ferme, et recommence à penser.
La petite fille passa la paume de sa main sur ses joues, et attrapa l'éclat. Elle le porta à ses yeux, l'observant longuement, avant de le ranger dans la poche de sa veste. Le petit garçon lâcha soudainement la main de la petite fille, pour rejoindre un autre chemin, parallèle au sien. Elle n'avait plus personne à guider, elle était de nouveau seule. Quelques personnes vinrent croiser sa route. Quelques uns pour une poignée de minutes, d'autres pour une poignée d'années, restant par la suite sur des chemins plus ou moins éloignés, plus ou moins similaires. Un petite fille brune, qui portait constamment dans sa main deux petites perles noires de jais, entra durablement sur le chemin de la petite blonde. Elles devinrent complémentaires, s'aidant à éviter les racines qui bordaient la route, sauter par dessus les innombrables flaques et les dangereuses failles du sol. Le sourire que la petite fille avait perdu réapparaissait peu à peu, éblouissant son visage, faisant disparaître la courbure lassive de son dos.
Je rouvre les yeux encore une fois. La joie m'a envahi. Cette petite brune avait été toute mon enfance oui, et même ensuite. Elle avait fait resplendir ma vie, était devenu le messie de mon destin. Alors que mon sourire devint intarissable, je me pose quelques questions : depuis combien de temps erré-je dans le néant ? Aurais-je perdu le fil du temps.... Mais c'était sans importance. Mes yeux se clôrent, une fois de plus, doucement...
Le corps tout entier de la petite fille devenait de plus en plus blindé. Mais son armure était de verre, et un choc, une secousse un peu trop forte lui serait fatale. Elle portait également un masque, qu'elle avait nommé Confiance. Il tombait parfois, mais seul quelques personnes avait vu la petite blonde à visage découvert. Les larmes devenaient alors incontrôlables, son cœur était un mécanisme rouillé. Les personnes qui virent son vrai visage essayèrent de réparer la machinerie, mais même à 3, à 4, à 10, ils n'y arrivaient pas. La rouille attaquait de trop le fer, faisait crisser les rouages. La poupée de fer avait-elle fait son temps... ? Non, ça n'était pas fini. Pas déjà. Il lui manquait ce déclic. L'ambition. Le désir d'avancer. Un garçon, grand, arriva subitement pour lui tenir la main. Il la guida, la fit avancer plus vite encore. Son cœur battait à tout rompre, il lui fit découvrir des paysages dont elle n'avait jamais soupçonné l'existence. Il l'aidait à ouvrir des portes, laisser tomber peu à peu son masque, n'en avoir plus besoin. Ils décidèrent de ne pas se lâcher, de s'aider toujours. Ils s'en firent la promesse, un matin. Leurs empreintes de pas évoluaient côte à côte, sur une longue distance.
Je rouvre les yeux. Son nom me revenait. Il avait fait changer en moi tellement de choses. Jamais je n'aurai pu lui en être plus redevable... Et alors que je pense à tout cela, je me pose une autre question. En tournant la tête autour de moi, je ne vois que de l'obscurité. Mais où suis-je... Après tout, cela n'a aucune importance. Mon monde, je préfére alors me le créer dans mon imagination. Je ferme les yeux, une énième fois...
Sa voie, elle la connaissait par cœur. Elle ouvrait d'un coup sec les portes qui entravaient son chemin, prenait chaque pont, chaque passage en milieu hostile, défiait quiconque s'opposait à sa route. Le garçon, qui comme elle, avait énormément grandi, l'aidait à pousser les lourds battants, lui faisait la courte échelle, l'aidait à gravir chaque marche. Elle en faisait de même de son côté, même si elle ne semblait pas bien douée... Et sa route devenait interminable, semée d'embûches, mais le sourire restait constamment ancré sur son visage... Je crois...
Quand je rouvre les yeux... Mais au juste, sont-ils vraiment ouverts ? Ou n'est-ce que le fruit de mon imagination ? Et puis... Où suis-je bon sang... Et quelle heure est-il ? Je n'en ai aucune idée, mais finalement, je crois que cela ne m'importe plus. Je ferme les yeux, en ne cessant de sourire. Cette petite fille, je le sais, c'est moi. Mais comme elle, je ne porte plus de nom, je ne m'en souviens pas. Ce n'est pas grave, on ne me le demandera plus. Mes souvenirs peuvent devenir ma vie à présent. Suivre la route de mon reflet, et me réjouir de chaque étape franchies. Oui, rien n'est plus vivant qu'un souvenir. Au diable la folie, j'ai décidé de vivre.
- III- L'oubli:
Ce jour-là, il arrive sans vraie raison. Tu te lèves comme si rien n'allait se passer, tu suis le même rituel que chaque matin, machinalement, celui que tu pourrais effectuer les yeux fermés à présent. Et puis, une petite flamme s'allume, au fond, tout au fond de ton esprit. Tu ne sais même pas vraiment qu'elle est là, tu ne sais pas du tout ce qu'elle est. Alors, tu avances, tes pieds nus trainent sur le sol glacé, ça ne te fait plus rien d'avoir froid. D'habitude, tu aurais foncé chercher de quoi te réchauffer. Mais ce matin-là, tu as oublié. Tu ne te préoccupes pas non plus de la brise, venue d'une fenêtre entrebaillée, qui soulève ton tee shirt. Ce même tee shirt qui t'as enveloppé durant cette nuit dont tu viens à peine de t'extirper. C'est un peu comme si tu avais aussi oublié les frissons qui te parcourent. Tout simplement. Tu ne sais pas où tes pieds te portent. Bizarrement, tu n'avances pas vers la cuisine, ni vers la table où repose tranquillement ton petit déjeuner. Non, tu avances vers la porte d'entrée. Et, pieds nus, à peine habillé, tu abaisses la lourde poignée. Tu ne sais pas bien pourquoi, mais tu ne t'arrêtes pas. Quand le vent vient s'engouffrer dans tes cheveux et sous tes vêtements, tu ne trésailles pas, tu oublies encore ce qu'est la morsure du froid. Tu poses un pied devant toi, puis un autre, et un autre encore, et tout se suit. Tu ne sais même plus si tu as fermé la porte derrière toi, tu ne vérifies pas, non, tu avances. A aucun moment tu ne baisses les yeux sur tes pieds endoloris, tu les as oubliés eux aussi. Est-ce que tu sais où tu vas ? Non, ou alors si, mais inconsciemment. Tu as oublié de vouloir comprendre. Ton chemin est droit, direct. Pas de détours inutiles, d'arrêts quand un oiseau perturbe le silence. Tu ne sais pas où tu vas, mais tu es décidé. Ca, c'est une des rares choses que tu n'as pas oublié. Soudainement, tu t'arrêtes. Tu portes tes deux mains devant toi, paumes vers le ciel. Tu les fixes. Et là, tu te rends compte que tu avais oublié qu'elles étaient tiennes. Tu les laisses retomber et tu fixes l'horizon. C'est ce jour-là que tu te rends compte que tu étais en train de t'oublier. De te perdre dans ce quotidien où tu reproduisais exactement les mêmes gestes. Machinalement. Oui, tu étais en train de t'oublier. D'oublier... quoi ?
Alors tu te retournes, tu poses un pied devant l'autre, imperturbable. Puis tu sens quelque chose s'éteindre. Quelque chose s'éteindre, oui, au fin fond de ton esprit. Alors tu repousses la porte d'entrée. Et quand tu poses un premier pied sur le sol, tu fonces chercher des chaussures. Parce que tu as eu froid. Et puis tu te diriges vers la cuisine. Vers la table où repose immanquablement ton petit déjeuner. Tu as déjà tout oublié. |
|